
Un film de Jean IMAGE | Jeune-public | France | 1950 | 80mn
Sept petits garçons se promènent dans la forêt quand Jeannot, le plus petit d’entre eux, décide d’aller combattre l’ogre pour qu’il ne puisse plus manger de petits enfants. Dans le château de ce dernier, Jeannot est fait prisonnier, mis en cage et réduit à la taille d’un insecte. Mais une pie voleuse s’empare de la cage, et Jeannot se retrouve transporté à Insect-Ville, entraîné malgré lui dans un extraordinaire voyage par un énorme lézard…
Sortie en salles le 10 février 2010
Premier dessin animé français de long-métrage, Jeannot l’intrépide ressemble à un somptueux album colorié dont les insectes stylisés s’animent sur un rythme follement accéléré. Adaptation libre du Petit Poucet de Charles Perrault, ce voyage nous mène du château de l’ogre à un monde fantasmé où des abeilles colorées composent un élégant dessin animé. Dans la lignée des premiers contes animés de Walt Disney (Blanche-Neige, Fantasia) et imprégné d’une poésie onirique inimitable, Jeannot l’intrépide est un spectacle fabuleux destiné aux enfants. Ce long-métrage de Jean Image a été récompensé par le Grand Prix du Film pour l’Enfance à la Biennale de Venise en 1951.
JEANNOT L’INTRÉPIDE, MON PREMIER LONG-MÉTRAGE
Par Jean IMAGE
« Depuis longtemps, depuis ma tendre enfance, j’étais passionné par la vie des insectes. Les livres, comme ceux de Maeterlinck sur La Vie des abeilles ou La Vie des fourmis étaient mes lectures de chevet.
À juste titre, on dit que les lectures de notre enfance, surtout les premiers livres, sont d’une importance capitale dans la formation et le destin de chaque être. En tous les cas, en ce qui me concerne, je me souviens encore que pendant mes vacances passées chez mes grands-parents dans un petit village des Karpates avant d’être en âge de fréquenter l’école, j’ai couché par terre, observé des heures entières le "manège" des fourmis, essayant de deviner à quoi rimait tout ce va et vient de ces petits êtres besogneux.
Puis, en relisant Le Petit Poucet de Perrault, cela m’a donné l’idée de base d’un scénario intitulé Les Nouvelles Aventures du Petit Poucet. Ce conte n’a été que le point de départ d’une aventure fantastique, car l’ogre transposé à une époque proche de la nôtre, réussit, grâce à une machine infernale, à réduire la taille de ses victimes à de si minuscules proportions qu’il pouvait les dévorer comme un sandwich.
Mais Jeannot, le petit poucet, parvenait à s’évader et se vit plongé dans l’univers mystérieux des insectes, où il put s’initier à la manière de vivre de toute ce petit monde.
Mon but, en mettant en scène la vie d’un petit garçon au comportement d’un jeune scout avec ses vertus de courage, de bravoure et d’intrépidité, était d’apporter dans ce dessin animé d’une heure vingt, du mouvement, des aventures, de la poésie, des gags, mais j’ai surtout pensé faire un FILM POPULAIRE. »
Extrait de 50 années de dessin animé, écrit par Jean IMAGE en collaboration avec Serge KORMANN
Jean Image, UN PRÉCURSEUR ET CRÉATIF À l’IMAGINATION POPULAIRE
« Le dessin animé est un art en soi et en même temps un métier artistique. Il est la création dans toute l’acceptation du mot. Cette création, qui est du domaine de l’imagination, est comparable à celle d’un peintre devant sa toile, d’un sculpteur devant son bloc de marbre ou d’un écrivain devant sa feuille de papier vierge. »
Jean IMAGE
En réalisant Jeannot l’intrépide, le premier dessin animé de long-métrage en Technicolor du cinéma français, Jean Image n’a pas seulement inscrit son nom dans l’histoire : il a été un véritable précurseur du métier, ouvrant grande la porte aux pratiques du dessin animé en France. Si l’on peut supposer qu’il ait été marqué par l’exemple de Walt Disney, Jean Image eut l’intelligence de garder le maître américain en référence tout en cherchant à s’en démarquer, attitude nécessaire en regard des budgets extrêmement précaires qu’on lui mettait à disposition. PourJeannot l’intrépide, il dut aller régulièrement à Londres où se trouvait le seul laboratoire d’Europe permettant de développer en Technicolor. Malgré ces contraintes techniques, il parvint à mener à bien son projet en dix-huit mois et avec une équipe réduite de moins de 40 personnes. Inspiré par le conte du Petit Poucet de Charles Perrault, par les livres de Maeterlinck, le style du film était complètement original, la mise en scène inventive, l’animation souple et rythmée : Jeannot l’intrépide était né.
Le film dut attendre l’année suivante, 1951, et un regain d’intérêt grâce au Grand Prix du Film pour l’Enfance obtenu à Venise, puis à Trieste pour sortir dans les circuits français. L’accueil du public fut enthousiaste : 600 000 entrées en France et le film resta à l’affiche dix semaines ! Dans ses mémoires, Jean Image se souvient de la longue file d’attente qui s’étendait du music-hall Olympia jusqu’à l’entrée de la salle Hollywood : enfants et adultes voulaient voir le film.
Mais la grande nouveauté, ce fut l’extraordinaire carrière internationale que connut Jeannot l’intrépide. Jean Image, qui n’avait pas encore d’expérience commerciale, dut être aidé par des agents spécialisés dans la distribution pour suivre les ventes à l’étranger. C’est la première fois qu’on avait une telle distribution internationale pour un dessin animé français. Aussitôt après, Jean Image réussit à obtenir des subventions du CNC, qui existait seulement depuis 1946, ce qui lui permit d’enchaîner avec Bonjour Paris. Le film était tiré d’une idée de sa femme, surnommée Eraine, qui avait également collaboré au scénario de Jeannot l’intrépide. Ce dessin animé poétique, racontant l’escapade de la Tour Eiffel dans Paris, fut présenté à Cannes en 1953.
Jean Image était devenu réalisateur de dessins animés, un métier insolite et nouveau à une époque où l’animation était surtout réservée à la réalisation de films publicitaires. C’est d’ailleurs là qu’il avait fait ses premières armes avant de venir s’installer en France, le pays d’Émile Cohl, que l’on considère comme l’inventeur du dessin animé cinématographique. À Paris, Jean Image avait travaillé avec le peintre Vasarely, hongrois lui aussi, et cotoyé toute une diaspora magyare qui l’avait soutenu.
Sans en être l’exemple le plus connu, Jean Image appartient à une génération d’artistes hongrois qui se sont exilés avant de suivre des carrières marquées par le goût de l’innovation, et notamment dans le dessin animé. À Budapest, il avait croisé George Pal, ensuite parti tourner de célèbres films de poupées aux États-Unis. À Londres, il travailla avec un autre compatriote : John Halas, réalisateur du long-métrage d’animation Animal Farm (1954)avec sa compagne Joy Batchelor. L’expérience dura quelques mois, mais le climat de Londres et quelques malentendus abrégèrent son séjour. Après l’Angleterre, l’Allemagne, et un passage éclair aux États-Unis, destinations rendues possibles grâce à sa nouvelle renommée, Jean Image décida finalement de rester en France.
En 1936, quinze ans avant Jeannot l’intrépide, Paul Grimault et André Sarrut avaient créé la société de production Les Gémeaux. Grimault avait pu ainsi réaliser La Bergère et le ramoneur, conçu entre 1947 et 1950, puis sorti en 1953 sans son consentement à la suite de problèmes divers. C’est dans un tel contexte d’essor du dessin animé cinématographique que Jean Image réalisa ses premières œuvres. Chez lui, comme chez Pal, Halas ou Grimault, il y avait cette même volonté de légitimer le dessin animé comme art ou média, au même titre que les films traditionnels.
Mais contrairement à Paul Grimault, qui avait choisi la voie de l’auteur radical et métaphorique, et contrairement à Walt Disney, qui concevait ses films avec pour seule finalité l’entertainment, Jean Image réalisait des dessins animés populaires liés à une double exigence de divertissement et de pédagogie. Ce n’était pas un expérimentateur acharné du langage animé comme l’avaient été, par exemple, les animateurs abstraits Oskar Fischinger et Norman McLaren, mais plutôt un créatif qui envisageait ses films comme des véhicules pour délivrer des messages. Les séquences de Jeannot l’intrépide décrivant le fonctionnement de la microsociété d’Insectville et de la ruche suivent cette logique de pédagogie.
Au-delà du cinéma, Jean Image profita du développement d’un nouveau terrain médiatique pour approfondir cette démarche : celui de la télévision. Le réalisateur est resté célèbre pour ses séries télévisées, qui font partie de l’inconscient collectif de nombreuses générations. Avec l’ORTF, à partir de 1960-62, sa carrière prit un nouvel essor. La série Les Aventures de Joe, très inspirée de Jeannot l’intrépide fut un succès et deux autres séries furent aussitôt commandées : Joe chez les fourmis, Joe au royaume des mouches… Suivirent une multitude d’autres séries, dont Kiri le clown qui fit figure de référence en battant tous les records. Les ventes de droits ont explosé, et, avec elles, sont apparus les produits dérivés, le merchandising… C’était l’époque du premier MIPCOM (Marché international des contenus audiovisuels) où Jean Image avait loué un stand. De par ses nombreux voyages, il avait une sensibilité européenne et parlait couramment anglais : il put ainsi promouvoir ses productions et conclure de nombreux contrats avec l’Europe et beaucoup d’autres pays.
Par la suite, il produisit d’autres longs-métrages, Aladin et la lampe merveilleuse, Les Fabuleuses Aventures du légendaire Baron de Münchausen,et malgré les difficultés financières, resta un producteur convaincu.
Le monde s’est ouvert à l’animation, aux séries françaises, et Jean Image a su exploiter toutes les innovations liées à ces nouvelles pratiques. Il avait senti, avant beaucoup d’autres, que la diffusion à l’international était une question très importante. Sur ce point aussi, il était précurseur. Il a contribué à donner une identité à l’animation française dont l’influence s’est ressentie par la suite.
L’apport de Jean Image à l’égard de l’animation française ne s’est pas arrêté à son premier coup d’éclat. Pionnier du dessin animé de long-métrage, Jeannot l’intrépide a aussi été la première étape d’une formidable carrière motivée par une imagination inépuisable, un talent original et un désir permanent d’innovation.
JEANNOT L’INTRÉPIDE ET L’UNIVERS DU CONTE
Conçu au départ sous le titre Les Nouvelles Aventures du Petit Poucet, Jeannot l’intrépide est une fantaisie qui reprend le célèbre conte de Charles Perrault tout en l’ouvrant sur une nouvelle aventure, plus vaste et farfelue que l’histoire originale. Le dessin animé propose ainsi un voyage plus large au cœur de l’univers complexe des contes.
Les différences entre Jeannot l’intrépide et Le Petit Poucet sont significatives. Le film apparaît comme une nouvelle version du conte, adaptée au public du XXe siècle et mélangée à l’univers des insectes. Le conte pour enfants se définit justement par son caractère inépuisable. L’histoire originale peut être racontée d’une infinité de façons, et les contes les plus célèbres sont issus d’une très ancienne tradition orale. Ce n’est pas un genre littéraire fixe, mais il existe à travers la transmission : il est toujours possible de le remettre à jour, de le réécrire, ou de le raconter autrement.
Dans la manière même de dessiner ses personnages, Jean Image répond aux codes du conte pour enfants. Ses figures, simples et schématiques, aux proportions démesurées, semblent tout droit sorties de cahiers d’école gribouillés par des enfants imaginatifs. Certaines parties du corps de l’ogre semblent plus grosses, comme pour souligner sa seule fonction : manger les petits. Comme le loup du Petit Chaperon rouge, à la question « Mais pourquoi tes mains sont-elles si grandes ? », il répondrait par « C’est pour mieux t’attraper, mon enfant ! ». Ou, pour justifier la démesure de sa bouche, la taille de sa langue, l’aspect tranchant de ses dents : « C’est pour mieux te manger, mon enfant ! ». De même, Jeannot et ses frères, identiques en apparence, figures effilées aux voix fluettes, semblent fonctionner comme des symboles : ce sont avant tout des petits enfants, comme tous les petits enfants de tous les contes de fées – ils ne sont pas encore « formés ». Ce sont les aventures et les épreuves traversées qui vont en faire de véritables personnages et construire leurs personnalités.
La matière de départ utilisée par Jean Image est donc celle, innocente et archétypale, du conte. Par son graphisme et son traitement de l’univers merveilleux, il se démarque clairement de l’influence de Walt Disney. On a souvent reproché à Disney de dénaturer les contes originaux en les édulcorant, en les humanisant ou en les rendant moins ambigus. Chez Jean Image, les personnages paraissent étrangement difformes, ils évoluent dès le départ dans un univers sombre, et la magie – comme chez Perrault – est assez peu présente : pour preuve, l’ogre a besoin d’un rayon laser, c’est-à-dire d’un instrument scientifique, pour rapetisser les enfants.
De même, si l’existence d’Insectville relève d’une fantaisie, elle n’est jamais justifiée par la baguette magique. Chez Disney, on nous aurait probablement expliqué que la ville était née d’un mauvais sort jeté sur un village d’humains. Jean Image, lui, préfère avoir recours à la fantaisie du dessin animé pour illustrer une certaine réalité documentaire. C’est toute la microsociété insectoïde qui est ici étudiée avec des explications et des commentaires humains, sans jamais avoir recours à une psychologie de l’humain.
Une fois Jeannot enfui du château de l’ogre et catapulté à Insectville, c’est presque un deuxième film qui commence. Jean Image s’éloigne du simple univers du conte pour nous montrer ce qui le passionne depuis sa plus tendre enfance : l’entomologie, l’étude scientifique des bêtes et des insectes. Tout en se permettant d’immenses libertés par rapport à l’histoire du Petit Poucet, il demeure particulièrement fidèle à deux facettes du conte : d’une part son accessibilité au plus grand nombre et aux enfants (le voyage dans Insectville est une vulgarisation du fonctionnement d’une ruche ou d’une colonie d’insectes), et d’autre part son souci d’enseignement (on apprend des choses sur le monde).
C’est précisément la grande particularité de Charles Perrault. Avec son recueil intitulé Contes de ma mère l’Oye, qui reprend des contes déjà connus, Perrault moralise ses histoires et en fait des outils « à l'enseignement des jeunes enfants ». Ainsi, il rajoute des moralités à la fin de chaque conte, signalant quelles valeurs il illustre. De façon similaire, Jeannot l’intrépide possède un discours éducatif ; en plus du divertissement, le dessin animé a une fonction pédagogique.
Mais, ce n’est pas pour autant un récit d’apprentissage. Jeannot, malgré les épreuves, demeure un enfant. Avant toute chose, c’est son regard et sa capacité d’émerveillement qui nous transportent dans son monde magique. Et c’est là la priorité du conte : nous porter dans un univers merveilleux qui change sans cesse, semble toujours incertain et ne se fige jamais en une certitude d’adulte.
Réalisation : Jean IMAGE
Scénario : Paul COLLINE, sur une histoire imaginée par ERAINE & d’après Le Petit Poucet de Charles Perrault
Musique originale : René CLOËREC
Directeur de la photographie : Kostia TCHIKINE
Direction de l’animation : Albert CHAMPEAUX
Son : René SARAZIN
Chansons & Dialogues : Paul COLLINE
Production : Les Films Jean Image
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DVD 9 – NOUVEAU MASTERS RESTAURÉ Version Française Format 1.33 respecté 4/3 - Couleurs Durée du Film : 75 mn INCLUS : L'ÉDITION BLU-RAY DISC LE FILM + LES SUPPLÉMENTS EN HAUTE DÉFINITION ! BD 25 • MASTER HAUTE DÉFINITION •
1080/24p • ENCODAGE AVC Version Française PCM Mono Format 1.33 respecté • Couleurs • Durée du Film : 78 mn
SUPPLÉMENTS . IMAGE FANTAISIE (31 mn)
Le parcours foisonnant de Jean Image, de ses débuts à Budapest jusqu’à la série Les Aventures de Joe inspirée par Jeannot l’intrépide. Un portrait du cinéaste par sa fille, Marie-Luce Image.
. JOE CHEZ LES ABEILLES (1960 – Couleurs – 32 mn) 5 épisodes de la série télévisée de Jean Image & Denis M.G. Boutin
Après avoir empêché la destruction d’une ruche, Joe, un petit garçon qui aime la nature, se retrouve réduit par magie à la taille d’un insecte. Il découvre alors le monde merveilleux des abeilles en compagnie de la reine Fleur de Miel et de son fidèle ami Bzzz… . BANDE-ANNONCE 2010 Édition avec fourreau |
15,00 € |
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"Image Fantaisie" : entretien avec Marie-Luce Image
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