Euzhan Palcy naît le 13 février 1958 à Martinique, passant la plus grande partie de son enfance dans le village du Gros-Morne. Elle y exerce déjà son imaginaire débridé et son désir de cinéma, au contact de films américains visionnés à la salle paroissiale de son village, puis à Fort-de-France. C’est à cette même époque qu’elle découvre l’ouvrage de Joseph ZOBEL, Rue Cases-Négres, dont l’adaptation cinématographique devient une idée fixe pour la jeune fille.
Chemin faisant, Euzhan Palcy s’exerce à la réalisation dès l’âge de dix-sept ans, pour La Messagère (1975), moyen-métrage considéré comme la première dramatique d’Outre-mer, tourné de manière artisanale, en cachette, avec son frère Joël (présent dans Rue Cases-Nègres). Galvanisée par le succès de sa diffusion à la télévision antillaise, la jeune réalisatrice part pour la France poursuivre ses études, à la recherche de cinéastes africains. On la retrouve ainsi au générique de Safrana ou le droit à la parole (Sidney Sokhona) et O Mediana (Constant Gros-Dubois) au poste d’assistant-réalisateur. Cette période d’apprentissage se concrétise par son premier court-métrage, L’atelier du diable (1982), conte initiatique où un enfant ose s’aventurer dans la mystérieuse maison d’un vieil homme considéré comme un « sorcier », vivant reclus avec son coq.
Peu après, sa rencontre avec le producteur Claude Nedjar (Lacombe Lucien, La Guerre du Feu) est décisive pour concrétiser son rêve, soutenue par François Truffaut. Description passionnée d’une époque charnière de la colonisation, tourné en créole, sur le quotidien d’une grand-mère se tuant à la tâche pour que son petit-fils puisse réussir ses études, Rue Cases-Nègres est récompensé de nombreuses fois en festivals, et est distingué par le prix de la meilleure première œuvre aux Césars en 1984, ainsi qu’à la Mostra de Venise. Après François Truffaut, c’est un autre personnalité de choix qui soutient Palcy, soit Robert Redford, qui la propulse à la deuxième édition du laboratoire de Sundance. Doté d’un budget bien plus conséquent (20 millions de dollars contre 500 000 dollars pour Rue Cases-Nègres), son deuxième long-métrage, Une Saison Blanche et sèche, est adapté d’André Brink, un plaidoyer contre l’Apartheid en Afrique du Sud où se croise Marlon Brando et Donald Sutherland.
Après le succès critique de ce deuxième essai, Euzhan Palcy s’engage peu à peu dans la voie du documentaire au cours des années 1990, s’impliquant toujours dans la mise en valeur de la culture et l’Histoire des populations d’Outre-mer. Si Siméon raconte la vie d’un jeune musicien créole sur le ton de la fiction, Aimée Césaire : une voix pour l’histoire est une série de trois documentaires sur le célèbre poète et politique martiniquais. Tout comme Parcours de dissidents, hommage aux dissidents Antillais et à leur action au sein de l'Histoire, au son de la voix de Gérard Depardieu. Quant aux Mariées de l’île Bourbon, cette fiction télévisuelle raconte l’installation des colons français en Martinique et du métissage de la population par le mariage de ces derniers avec les esclaves venus de Madagascar.